Joseph “Mr. Google Eyes” August

(1931 - 1992)

Chanteur

Rhythm and Blues / Blues

13/09/1931

Naissance, dans le quartier noir de New Orleans, de Joseph Augustus. Enfance imprégnée de musique grâce aux spectacles de vaudeville. Le jeune Joe rêve d’être un artiste.

1940

Sa famille s’installe dans le quartier Iberville. Dès lors, sa vie va prendre un tournant : sa grand-mère le fait chanter dans la chorale de son église. Fils unique, Joe est très proche de sa mère et de sa grand-mère.

1943

Dès l’âge de douze ans, il travaille à mi-temps à livrer les sandwichs de Dooky Chase pour ramener un peu d’argent à la maison. « Et comme son fils Edward avait un groupe, j’étais toujours chez eux pour pouvoir l’écouter. J’y passait plus de temps quà la maison ». Mais sa mère et sa grand-mère ne voyaient pas d’un très bon œil le fait qu’il fasse de la musique, aussi ne voulurent-elles pas lui acheter un instrument. Tant pis, le jeune Joseph chanterait.

1944 – 1945

Son travail lui donne l’occasion de rencontrer des musiciens. Il commence à trouver de petits engagements comme chanteur occasionnel dans des orchestres, dont celui que sponsorisait Dooky Chase. Economisant tous ses maigres cachets, il réussit à s’acheter une sono complète, ce qui était assez rare à l’époque. Ainsi, de plus en plus d’orchestres vinrent le solliciter pour louer la sono… et le chanteur ! Sa mère accepta la situation et le laissa chanter le blues à condition qu’il autorise l’église à utiliser sa sono le dimanche !

1945 – 1956

Dès lors, il va partager l’affiche avec des artistes comme Roy Brown, Paul Gayten et Annie Laurie ou Wynonie Harris, dans les clubs de la ville comme le Downbeat, le Robin Hood, ou me Dew Drop Inn. C’est Billy Eckstine (qu’on appelait ‘Mr. E) avec qui il avait fait une ‘bataille de blues’ au club Desire, qui l’appela le premier ‘Mr. G). Il a tout juste quinze ans lorsqu’il signe chez Coleman Records de Newark, New Jersey, pour son premier disque. Il en fera quatre pour le label : Poppa’s Be Bop Blues, Real Young (Just 16 Years Old), No Wine, No Woman, et Rock My Soul. Tout allait bien pour Mr. G qui, grâce à sa maison de disques, devint de plus en plus populaire à New Orleans. « Le plus jeune chanteur de blues du pays » attirait la convoitise, notamment de Columbia qui souhaitait étoffer son catalogue avec des artistes noirs. Ils rachetèrent son contrat et lui firent enregistrer quatre disques. Il s’installa donc à Newark et s’y maria. Il travaillait à New York et dans tout le pays, revenant régulièrement à New Orleans où Frank Pania était heureux de l’accueillir au Dew Drop Inn. Au début des années 50, Mr. Google Eyes était au sommet de sa carrière, passant même au célèbre Birdland, haut lieu du be-bop de Charlie Parker et Miles Davis !Il publia des disques sur plusieurs labels : Columbia, bien sûr, mais aussi RCA, Lee’s, Domino, et Duke/Peacock. Tout était facile, l’argent coulait à flot : voiture décapotable, chauffeur, valet de chambre, etc… Aussi ne va-t-il pas tarder à se retrouver complètement fauché !

1956 – 1960

Il travaille alors dans un orchestre de blancs, au Crystal Club, tenu par la mafia de Newark. Il envoie de l’argent à sa mère, en Californie, qui élève son fils depuis sa séparation avec sa femme. Il décida finalement de quitter l’Est pour la Côte Ouest, où il retrouvera Johnny Otis avec qui il avait établi une relation amicale et professionnelle à Newark. Ils travaillent un temps ensemble dans les clubs de Los Angeles.

Années 60 &
Années 70

Rentré à New Orleans en 1960, il trouva un job d’animateur d’un spectacle de plusieurs artistes au Sho Bar, dans Bourbon street. C’est alors qu’un incident survint et bouleversa sa vie… et faillit la lui retirer ! A cette époque, la ségrégation, bien que plus pour longtemps, était encore d’actualité. Il fut arrêté, alors qu’il était avec son amie blanche, devant le Dew Drop Inn, dénoncé par le chauffeur de taxi qui les avait amenés. Finalement libérés, c’est son amie Vicki, furieuse, qui lui tira un coup de fusil dans la poitrine. Bien qu’à l’hôpital, il fut la dernière personne à New Orleans à être accusé de « mélange de race » avant que son avocat ne réussisse à faire annuler l’accusation, faute de preuve. Après cet avertissement, Mr. G décida de s’occuper seul de ses concerts et de se tenir éloigné de Bourbon street.  Il entreprit de rénover un bar, le Old Fan Tan, avec une amie, Mlle Elsie Montgomery, et de changer de métier, malgré une dernière séance d’enregistrement avec Allen Toussaint (Everything Happens At Night). En plus de son bar, Mr. G fit de la radio jusqu’au milieu des années 60. Il devient ensuite l’animateur régulier du Dew Drop Inn, jusqu’à sa fermeture suite au décès de Frank Pania.  Il continua à tenir des bars tout en restant très proche du milieu du spectacle. Il travailla au Mason’s Strip, comme chanteur et animateur  pendant cinq ans avant de s’occuper de plusieurs groupes comme Las Vegas Connection, Antoine Domino, Jr., et Oliver & The Rockettes.

Depuis la fin des années 70

 C’est dans le but de venir en aide à la communauté noire que Joseph Augustus créa son organisation politique, Blacks That Give A Damn, à laquelle il se consacre principalement depuis.  Au début des années 80, il dirigeait le ‘Dew Drop Inn Revivals’ qui se déroulait pendant le New Orleans Jazz & Heritage Festival. Toujours attaché à la musique, on pouvait encore le voir au sein de la ‘New Orleans Blues Revue’ aux côtés de Earl King et Deacon John. Il vit tranquillement dans un tout petit cottage du neuvième arrondissement de New Orleans, et se consacre à l’aide des enfants en difficultés tout en faisant pression sur les politiciens locaux.

09/08/1992

Décès de Joseph August, à New Orleans, dans sa soixante-et-unième année !

Présent au tout début, Joseph « Mr. Google Eyes » August doit être considéré comme un maillon essentiel de la chaîne R’n’B de New Orleans. Son influence fut reconnue par des artistes de renom tels que Johnny Adams, Earl King, King Floyd, Dr. John ou Deacon John.

Discographie

Rock My Soul

Route 66

1986

The Okey Rhythm & Blues Story 1949-1957 (compilation)

Okey

1993

Jump’n’Shout : New Orleans Blues & Rhythm
(compilation - 2 titres : Just To Be Home With You / I Cried)

Delmark

2000

Getting’ Funky : The birth of New Orleans R&B
(compilation - 2 titres : Just To Be Home With You / I Cried)

Proper Records

2001

Mon choix : Rock My Soul (Rough And Rocky Road / Poppa Stoppa's Be Bop Blues / No Wine, No Women / Young Boy / Life Can Be A Hard Road To Travel / Love Me / Rock My Soul / I'm Glad You're Comin' Home / Cryin' For You / Oh What A Fool / No Wine, No Women / Play The Game / Rough And Rocky Road / For You My Love / I Cried / Strange Things Happening In The Dark / Boogie With Calypso)

On imagine bien, à l’écoute de ce disque, la popularité de ce chanteur. Dommage que les aléas de la vie ne lui ont pas permis de poursuivre l’aventure musicale !

Pour en savoir plus : Le livre I Hear You Knockin' dans lequel Jeff Hannush lui consacre un chapitre.