Skip EASTERLING

(1945 -)

Chanteur – Pianiste - Organiste

R’n’B – Soul Music – Swamp Pop

01/07/1945

Naissance de James Robert Easterling à New Orleans. Le jeune James, surnommé "skip" grandit à Slidell, de l’autre côté du lac Ponchartrain, au nord-est de New Orleans. Vers l’âge de huit ans, il vit avec sa grand-mère, près d’une église pentecôtiste dans laquelle trône un piano droit. A chaque fois qu’il le peut, le jeune James s’installe au piano et, malgré les réprimandes de sa grand-mère, apprend suffisamment pour s’accompagner tout en chantant.

1955 – 1962

Dès 1955, il commence à écouter la retransmission du Louisiana Hayride de Shreveport sur la radio KWKH. C’est là qu’il entend pour la première fois un nouveau chanteur du nom d’Elvis Presley. Il est tellement enthousiaste qu’il persuade sa mère de faire en voiture les 200 kilomètres qui les séparent de Shreveport pour voir son idole. Alors qu’il n’a que 14 ans, il partage sa vie entre l’école et le Blue Note Lounge d’Eddie Lang ! En effet, après s’être marié, Eddie Lang, le guitariste n éo-orléanais, s’était installé à Slidell. Il devint ainsi le ‘mentor’ de James Easterling et l’autorisa à chanter avec son orchestre. Un jour, Lang lui annonça : « Skip, Sais-tu que pour un blanc, tu as beaucoup de ‘soul’ (you got a lot of soul) ».

1962 – 1964

En 1962, leur amitié trouve une concrétisation  en enregistrant les titres You Think You’re Smart et Angel Of Mine dans le fameux studio de Cosimo Matassa à New Orleans. Les deux morceaux seront publiés sur l’unique 45t du label Reno, créé par Lang et Johnny Williams, le manager de Easterling, sous le nom de James Easterling. Seuls 300 exemplaires furent pressés et le disque n’obtint aucun succès n’ayant pas réussi à s’imposer auprès des radios locales. Cependant, alors qu’il n’a que 17 ans, il commence à se produire sous le nom de Skip Williams en jouant du R’n’B dans les clubs de la rive nord du Lac Ponchartrain, ainsi qu’à New Orleans. En 1963, il enregistre une démo de la chanson de Junior Parker Next Time You See Me au House Of Music Studio de Skip Godwins en espérant intéresser un label. Johnny Williams prit alors l’annuaire téléphonique et trouva le numéro de Joe Banashak, le propriétaire de A-1 Distribution et des labels Instant et Minit. Il l’appela et eut sa femme Bobbie qui lui dit d’apporter la bande à leur bureau, rue Baronne. Skip et Johnny s’y rendirent donc et lui firent écouter les chansons. Elle appela Joe qui, après une première écoute lui dit : « Fils, nous allons nous faire pas mal de fric ! ».  Dans la foulée, un contrat fut signé mais, comme Skip n’avait pas encore dix-huit ans, il dût demander l’autorisation à sa mère. Joe Banashak décida de publier les disques de Skip sur ALON Records le label sur lequel il sortait les productions d’Allen Toussaint. Ce dernier, bien qu’alors absent pour cause de service militaire, avait laissé des bandes prêtes à Banashak. Il suffisait d’y ajouter le chant. Deux de ces chansons étaient Sugar Blocks et Don’t Let Him. Bien que le chant avait déjà été fait par Mary Lynn, Banashak proposa à Skip de le refaire. Ce dernier accepta et entra en studio. Le 45t fut publié en 1963 et commença à passer en radio.

Joe Banashack pris alors le jeune Skip sous son aile, l’embaucha pour travailler dans sa compagnie de distribution et lui proposa même de vivre chez lui, avec sa famille, à Algiers.

Une nouvelle séance d’enregistrement donna Wishing Well et You Sit And Cry Alone et un nouveau 45t fut publié en 1964. Tout le monde était enthousiaste et le disque devint disque de la semaine sur les radios WTIX et WNOE.

1964 – 1966

Mais tout d’un coup tout s’arrêta ! Les Beatles avaient fait leur apparition et les stations de radios ne passaient plus de musique régionale ! Banashack réagit en faisant la promotion de Skip comme un chanteur de Rhythm and Blues afin d’être diffusé sur les stations noires. Son 45t suivant – l’un des pires qu’il ait enregistré, selon Skip lui-même – fut Shiny Gold Ring. Skip Easterling continua à se produire, notamment au Papa Joe’s sur Bourbon Street, dans un groupe comprenant le chanteur Joe Barry, le guitariste Joey Long, le saxophoniste Johnny Penino, le bassiste Earl Stanley et le batteur ‘Little’ Joe Lambert. Ils jouent alors des reprises de Bobby Bland, Irma Thomas, Arthur Alexander, Danny White et Art Neville. La vie des musiciens de la Rue Bourbon est assez éprouvante à cette époque. Le groupe se produit de 3h30 à 10h00 puis change de club pour s’installer au Dream Room de 21h00 à 2h00 du matin. C’est un va et vient incessant de matériel après chaque prestation. Pendant un an, Freddie Fender fit partie du groupe sous le nom de José Martinez, ne pouvant pas officiellement se produire suite à sa condamnation pour détention de marijuana.

1966 – 1970

A son retour d’armée, Allen Toussaint se remit au travail et écrivit et produit Run Along To Mama et All For You pour Easterling. Mais, suite à un désaccord, cette session marqua le début de la fin de l’association Banashak-Toussaint, ce qui amena Banashak à utiliser Eddie Bo comme nouveau producteur pour ses labels. La première session avec Eddie Bo en janvier 1967 donna The Grass Looks Greener, une de ses meilleures performances vocales, selon Skip Easterling lui-même. Grâce notamment au DJ Shelly Pope de la radio WBOK qui diffusa massivement la chanson, Skip atteint le sommet du hit-parade R’n’B de New Orleans en 1967. C’est à cette époque qu’il commença à se produire dans les clubs noirs où sa musique était appréciée. Eddie Bo produisit ensuite la superbe ballade Just One More Time qui fut publiée la même année. Malheureusement, Bo et Banashak se brouillèrent et les enregistrements de Skip Easterling en cette fin de décennie furent dirigés par divers producteurs pour des résultats plutôt médiocres. De plus en 1970, Banashak mit fin à ALON et transféra Easterling sur Instant Records.

1970 – 1972

C’est Huey Smith qui fut sollicité pour les nouvelles productions sur Instant. Joe Banashak proposa alors à Skip d’enregistrer une reprise du Hoochie Coochie Man de Muddy waters. Malgré les réticences de Skip, Joe réussit à le convaincre argumentant que les arrangements de Smith, basés sur la ligne de basse du Groove Me de King Floyd, donneraient quelque chose de très différent du blues de Muddy Waters. Ce fut une réussite, le single devenant N° 1 à New Orleans, empêchant du coup le Mr. Big Stuff de Jean Knight d’atteindre le sommet ! Suite à ce succès, il est sollicité pour jouer dans les clubs noirs de la ville, mais aussi en Alabama et au Mississippi. A l’époque, il partage la scène avec des artistes comme William Bell, King Floyd, Jean Knight ou Barbara Lynn et gagne 1500 dollars pour un set de 40 minutes ! Mais le rêve ne dura pas longtemps : son nouveau single, enregistré avec Smith, Too Weak To Break The Chains, ne passa même pas en radio et Skip se retrouva de nouveau à faire des spectacles de quatre heures dans les bars de "rednecks" de Bogalusa et Picayune pour 100 dollars ! Banashak publia encore trois singles de Skip Easterling, sans toutefois trouver écho dans les radios. En 1972, Banashak déçu par le milieu de la musique, quitta le business et devint témoin de Jehovah, comme Huey Smith !

1972 – 1975

Sans maison de disque, Skip continua, malgré tout, sa carrière en se produisant dans la région. Un jour de 1975, il reçu un appel de Freddie Fender lui annonçant qu’il venait de sortir une chanson, Before The Next Teardrop Falls, qui allait devenir un gros tube et, donc, qu’il souhaitait reformer le groupe de l’époque Papa Joe’s de la Rue Bourbon. Easterling contacta alors Earl Stanley et Johnny Penino, mais tout deux refusèrent… ce qu’ils regretteront losque la chanson devint effectivement un énorme tube !

1975 – 1978

Skip Easterling abandonna la musique pendant environ un an et se fit embaucher dans une société de désinsectisation !  Puis, Reuben Howell, un ancien artiste de chez Motown qui vendait des voitures d’occasion à New Orleans, lui proposa de reformer un groupe. Ils jouèrent ensemble jusqu’en 1978 lorsque Freddie Fender appela de nouveau.

1978 – 1981

Fender lui donna une heure pour se décider ! Encouragé par sa femme, il décide de rejoindre Freddie Fender à Las Vegas, au Silver Bird Casino. Ils partent ensuite en Nouvelle-écosse, au Canada, avant de parcourir le monde ! En 1979, un accident de la route avec le bus de la tournée provoqua le décès du batteur Joe Lambert et du chauffeur du bus, Sonny Parker.Et au bout d’un moment, la lassitude et l’éloignement de sa famille le décidèrent à rentrer à la maison.

Années 80 & 90

Après avoir travaillé un temps sur un remorqueur, il créé son propre studio huit pistes où il travaille avec George Cureau sur la chanson Meat Rack Tavern. Celle-ci sortira en 1985, sur son dernier 45t.

En 1996, Skip Easterling décide d’exploiter son catalogue de chansons et envisage d’en faire enregistrer certaines par d’autres artistes. Il se met alors à faire des démos au Mohawk Studio de Slidell, et ce qui initialement devait être un projet pour d’autres chanteurs se transforme en projet de faire un CD de Skip Easterling. Malheureusement, peu après avoir commencé l’enregistrement, il dût être hospitalisé pour un emphysème. De plus, une fois rétabli, sa petite-fille Lorin fut kidnappée et assassinée lors d’un fait divers très médiatisé. Cet événement l’affecta profondément et, évidemment, l’enregistrement du disque en pâtit ! 19 chansons furent mises en boîte avec Cureau.  Un CD, intitulé Quarter In The Jukebox, était prêt à être publié en 1999 mais Skip, jugeant qu’il pouvait faire beaucoup mieux au chant, préféra ne pas le sortir et de le retravailler quand il irait mieux ! Finalement, un an et demi après, il s’estima prêt à produire ce qu’il pouvait faire de mieux estimant qu’il devait bien ça à Lorin et sa famille. Selon Jeff Hannusch, le CD, intitulé What’s The Story On You, fut re-mixé et terminé au Studio In The Country de Bogalusa à l’été 2000. Il n’a, cependant, jamais été publié !

Parallèlement, en 1997, Skip fit la connaissance de la chanteuse country DiAnne Foxx avec qui il commença à travailler, comme producteur notamment. Il produisit son premier album, Are You An Angel, qui sera publié en 1999 et élu ‘Album country de l’année’ ! Continuant sur cette lancée, il co-écrit des chansons avec elle et travailla à son nouvel album, Tainted Love, publié en 2001.

Depuis 2001

En 2001, Skip Easterling fut intronisé au Louisiana Music Hall of Fame. Lors de la cérémonie, il chanta I'm Your Hoochie Coochie Man, The Grass Looks Greener et quelques nouveaux titres (de son nouvel album inédit). Ce n’est qu’en 2004 qu’il remontera sur une scène, lors de la troisième édition du Ponderosa Stomp, au Rock’n’Bowl de New Orleans. Il se produit régulièrement depuis, notamment grâce aux concerts organisés par les organisateurs du Ponderosa Stomp ; à la fois lors de concerts en ville avec d’autres artistes (Henry Gray ou Rockie Charles, entre autres) et lors du méga concert annuel organisé pendant le Jazz Fest auquel il participe chaque année depuis 2004.

Pionnier méconnu du Rhythm and Blues de New Orleans, Skip Easterling est un exemple parfait d’intégration. Chanteur blanc de musique noir, ses auditeurs se demandaient souvent à qui ils avaient affaire ! Son tube, Hoochie Coochie Man, est resté dans les annales et Skip demeure un des meilleurs représentants d’une Blue Eyed Soul sudiste de qualité.

Discographie (discographie détaillée)

Taking Inventory

Charly

1988

What’s The Story On You

Jamais publié !

2000

Mon choix : Taking Inventory (I'm Your Hoochie Coochie Man / Ooh Poo Pah Doo / Little Wonderful Girl / Don't Let Him Come Between Us / Pennsylvania Coalyard Blues / Run Along to Mama / All for You / The Grass Looks Greener / Just One More Time / Too Weak to Break the Chains / I'm Your Man / I Don't Know / Travellin' Mood / How Can I Forget / I'll Be Standing By / Keep the Fire Burning)

Cet unique album de l’artiste (à ma connaissance) reprend quatorze des titres publiés sur ALON et INSTANT, et deux inédits (How Can I Forget et I’ll Be Standing By), ce qui représente à peu près la moitié de ce que Skip Easterling a publié !

Génial !

Pour en savoir plus : Le livre The Soul of New Orleans  dans lequel Jeff Hannusch lui consacre un chapitre.

Internet :